Revue de réflexion politique et religieuse.

Joseph Rat­zin­ger : Mon Concile Vati­can II

Article publié le 28 Oct 2011 | imprimer imprimer  | Version PDF | Partager :  Partager sur Facebook Partager sur Linkedin Partager sur Google+

Déjà cité dans l’éditorial du pré­sent numé­ro, ce livre ras­semble pour la pre­mière fois en fran­çais les confé­rences effec­tuées par l’expert conci­liaire qu’était alors l’actuel Benoît XVI, sui­vies d’un expo­sé au Katho­li­ken­tag de Bam­berg, en juillet 1966. Ces textes sont pré­sen­tés par le tra­duc­teur, l’abbé Eric Ibor­ra, après une pré­face de Mgr Ginoux, évêque de Mon­tau­ban. En annexe est repro­duit le dis­cours du 22 décembre 2005, qui pose les bases d’une inter­pré­ta­tion moyenne de l’événement conci­liaire des textes aux­quels il a don­né nais­sance et des appli­ca­tions issues de l’ensemble.
Joseph Rat­zin­ger était – et reste – un homme très pon­dé­ré, tou­jours dési­reux de nuan­cer ses remarques par des pré­ci­sions de détail et por­té à concé­der une part de véri­té chez ses adver­saires lorsqu’il lui est pos­sible de l’admettre. Ce trait donne plus de poids aux posi­tions théo­riques en fonc­tion des­quelles il s’engage dans les débats de fond. Un thème domine, que l’on peut consi­dé­rer comme le cri­tère prin­ci­pal en fonc­tion duquel il a vou­lu com­prendre Vati­can II : celui du dépas­se­ment de la crise moder­niste, ou plus exac­te­ment de la réponse qui lui a été don­née jusqu’au concile, réponse qui a struc­tu­ré le dis­cours des dif­fé­rents pon­tifes de Pie IX à Pie XII, dans le sens anti­mo­der­niste, fon­dé, selon Joseph Rat­zin­ger, sur « cette peur et cette méfiance secrètes pour les élé­ments de la pen­sée phi­lo­so­phique et his­to­rique moderne que pou­vait ren­fer­mer la théo­lo­gie », du Syl­la­bus à Huma­ni gene­ris (p. 71), une « théo­lo­gie des néga­tions et des inter­dits qui pou­vait être en soi juste à bien des égards, mais qui ne pou­vait pas appor­ter le renou­veau posi­tif que l’on était en droit d’attendre du Concile » (p. 72), une « ligne de l’isolement, de la condam­na­tion, de la défen­sive jusqu’au rejet presque angois­sé de la nou­veau­té »… (p. 73). En regard, c’est une atti­tude men­tale fon­da­men­ta­le­ment dif­fé­rente qui, selon le per­itus du car­di­nal Frings, se défi­nit dès la pre­mière ses­sion, par l’oecuménisme, mais sur­tout par une dis­po­si­tion d’ensemble expri­mée par le terme « pas­to­ral ». Celui-ci exprime la volon­té de « par­tir d’une atten­tion posi­tive à l’homme d’aujourd’hui, qui n’a jamais été aidé par ces condam­na­tions qu’il a trop long­temps enten­dues sur tout ce qui est faux, tout ce qu’il ne doit pas faire, pour arri­ver à ce qu’il a trop peu enten­du et qu’il veut vrai­ment entendre, à savoir ce qui est vrai, ce que le mes­sage de la foi peut appor­ter à notre temps, ce que celle-ci a de posi­tif à lui ensei­gner et à lui dire » (p. 74). Il semble que l’auteur de ces pro­pos n’ait jamais chan­gé de point de vue, même s’il est appa­ru à cer­tains (les théo­lo­giens de la libé­ra­tion par exemple, les zélotes de l’esprit du Concile) comme fai­sant retour à l’Inquisition. Bien au contraire, qu’il s’agisse des dis­cus­sions autour de la Révé­la­tion, de l’oecuménisme, de la liber­té reli­gieuse, de col­lé­gia­li­té et plus géné­ra­le­ment d’ecclésiologie, l’idée est fon­da­men­ta­le­ment la même – le « renou­veau dans la conti­nui­té » fon­dant une « her­mé­neu­tique de la réforme ». Cela est éga­le­ment vrai en matière de litur­gie, domaine dans lequel on aurait tort de pen­ser que Benoît XVI ne par­tage pas les idées du pro­fes­seur de théo­lo­gie qu’il était alors. Les pro­pos qu’il tenait à l’époque étaient sévères à l’encontre du rite en vigueur au moment du Concile (cf. pp. 147–152), ce qui explique vrai­sem­bla­ble­ment l’option dite de la réforme de la réforme dans ce domaine par­ti­cu­liè­re­ment sym­bo­lique.
Il y aurait encore beau­coup à rele­ver dans cet ouvrage très riche, dont on ne peut que conseiller la lec­ture atten­tive.

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