Revue de réflexion politique et religieuse.

Le Concile, texte et contexte. A pro­pos d’une cer­taine his­toire jamais écrite

Article publié le 3 Avr 2011 | imprimer imprimer  | Version PDF | Partager :  Partager sur Facebook Partager sur Linkedin Partager sur Google+

On a l’impression d’avoir tout lu sur le concile Vati­can II tenu d’octobre 1962 à décembre 1965, qu’il s’agisse d’essais sur l’organisation de l’Eglise, la morale, la litur­gie, la doc­trine, les dogmes. Tous les modes d’expression des­crip­tifs et ana­ly­tiques ont d’ailleurs été uti­li­sés, des études spé­cia­li­sées aux ouvrages monu­men­taux, des articles scien­ti­fiques aux essais enga­gés, des mono­gra­phies aca­dé­miques aux actes de col­loques et, bien évi­dem­ment des bio­gra­phies des pères et acteurs conci­liaires aux jour­naux et témoi­gnages des mêmes acteurs.
Ce foi­son­ne­ment édi­to­rial n’aurait pas for­cé­ment été une mau­vaise chose en soi si l’on n’avait obser­vé deux ten­dances lourdes venant gêner la séré­ni­té de sa récep­tion par les géné­ra­tions qui se sont suc­cé­dé depuis. La pre­mière de ces ten­dances est la pro­mo­tion sys­té­ma­tique d’une vision impo­sant de manière uni­la­té­rale une inter­pré­ta­tion enthou­siaste et triom­phante d’un concile pro­pre­ment génial dans ses textes, et hagio­gra­phique pour l’ensemble de ses pro­mo­teurs quitte, le pro­ces­sus bio­lo­gique ayant fait son œuvre, à pro­gres­si­ve­ment oublier tel ou tel digni­taire ayant révé­lé in ? fine une capa­ci­té de sou­plesse doc­tri­nale hors des limites accep­tables. La deuxième ten­dance a consis­té à occul­ter pen­dant trop long­temps la pro­blé­ma­tique fon­da­men­tale inhé­rente au Concile lui-même : celle de savoir s’il appa­raît dans la pers­pec­tive du déve­lop­pe­ment homo­gène de la doc­trine chré­tienne ou s’il a consti­tué un évé­ne­ment mar­quant de façon onto­lo­gique, à tout le moins une dis­con­ti­nui­té voire une rup­ture dans l’ensemble de l’apport des conciles qui l’ont pré­cé­dé. En écri­vant cela, nous n’avons pas per­du de vue, bien sûr, le débat osten­sible entre « tra­di­tio­na­listes » et défen­seurs d’un concile offi ciel­le­ment pas­to­ral, mais les uns et les autres ayant jus­te­ment eu une telle pro­pen­sion à rat­ta­cher les limites de l’Eglise à leur posi­tion res­pec­tive – l’exclusion étant tout de même une carac­té­ris­tique plus nette des seconds, deve­nus dog­ma­tiques – que le fond du débat en fut fort mal­heu­reu­se­ment biai­sé.
C’est pour­quoi Il conci­lio Vati­ca­no II. Una sto­ria mai scrit­ta du pro­fes­seur Rober­to de Mat­tei vient à point nom­mé pour cla­ri­fier ce débat atten­du sur la nature du Concile, notam­ment à par­tir de son approche his­to­rique.
Gros ouvrage de près de 630 pages, avec un fort appa­reillage de notes – dont un ensemble bio­gra­phique rap­pe­lant quels furent les acteurs de l’événement – cette his­toire inédite pos­sède, outre un index des noms de 25 pages, une biblio­gra­phie par genre, à laquelle on doit ajou­ter une note biblio­gra­phique pla­cée en fin d’introduction, ren­sei­gnant notam­ment sur les dis­tinc­tions entre les phases de pré­pa­ra­tion et de dérou­le­ment des tra­vaux, et per­met­tant de situer les dis­cus­sions entre Pères conci­liaires sur les dif­fé­rentes ver­sions des sché­mas qui leur étaient sou­mis. Outre l’introduction et la conclu­sion, l’ouvrage est scin­dé en sept cha­pitres chro­no­lo­giques rela­ti­ve­ment équi­li­brés qui vont d’un rap­pel très oppor­tun de la situa­tion de l’Eglise sous le pon­ti­fi­cat de Pie XII, de la marche au Concile à par­tir de la mort de ce pape jusqu’à « la pro­cla­ma­tion de guerre des pro­gres­sistes », d’un cha­pitre pour cha­cune des quatre ses­sions conci­liaires, et enfin de « l’époque » du concile de 1965 à 1978. La période cou­verte est donc celle des « vent’anni di sto­ria del­la Chie­sa », de la mort de Pie XII en 1958 à celle de Paul VI.

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