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Jean Haënt­jens : La ville fru­gale. Un modèle pour pré­pa­rer l’après-pétrole

Econo­miste et urba­niste, consul­tant en stra­té­gies urbaines auprès des col­lec­ti­vi­tés, l’auteur pré­sente une réflexion autour d’un thème très en vogue dans cer­taines approches de l’écologie urbaine, la fru­ga­li­té. En quoi celle-ci consiste-t-elle exac­te­ment ? Plus que la ville « durable », la ville fru­gale cor­res­pon­drait à une vision qui part du constat que l’accumulation des crises éco­no­miques, éner­gé­tiques et éco­lo­giques va obli­ger les col­lec­ti­vi­tés à poser des choix redou­tables, qui sont à anti­ci­per plu­tôt qu’à subir. La fru­ga­li­té choi­sie serait ain­si le prin­cipe fon­da­teur d’une nou­velle étape de l’aventure urbaine. Pour l’auteur, et pré­sen­tée en un quart de page, la fru­ga­li­té, au sens épi­cu­rien, pour­rait se résu­mer en un choix de vivre mieux en consom­mant moins. Ce prin­cipe, plu­tôt mini­ma­liste et a prio­ri des plus consen­suels, devrait per­mettre de déter­mi­ner des « menus urbains » plus dié­té­tiques que ceux de la fast-food city. Le pro­gramme s’annonce – il faut bien en conve­nir – assez fumeux. Exa­mi­nons donc les deux prin­ci­paux cha­pitres (l’équation de la ville fru­gale et les clés de l’urbanisme fru­gal) pour en savoir plus. Le pre­mier reprend la ques­tion du « coût urbain glo­bal », dif­fi­cile à déter­mi­ner, vieux pro­blème de géo­gra­phie urbaine posé en son temps par le célèbre his­to­rien de la ville Paul Bai­roch, de la « taille opti­male » des villes.
J. Haënt­jens entre­voit ce coût comme la solu­tion d’une équa­tion sub­tile à quatre « briques » –mobi­li­té, com­pa­ci­té, pola­ri­té (attrac­ti­vi­té) et qua­li­té urbaine –, com­pro­mis dont les « réglages fins » sont à adap­ter au cas de chaque agglo­mé­ra­tion. La pré­sen­ta­tion de cha­cune de ces « briques » reprend une syn­thèse plus que concise des tra­vaux et don­nées, dont cer­taines déjà anciennes, concer­nant la rela­tion entre den­si­té urbaine et consom­ma­tion d’énergie. Le second cha­pitre réser­ve­rait-il de meilleures sur­prises ? Hélas non, car y sont pré­sen­tées, et encore de manière suc­cincte, des recettes bien connues : par­ti­ci­pa­tion des habi­tants, réduc­tion des dis­tances, urba­ni­sa­tion rai­son­née des cam­pus… Y sont éga­le­ment déga­gées des prio­ri­tés nor­ma­tives qui exposent plus des pon­cifs qu’autre chose comme l’idée que dans les petites villes la prio­ri­té soit de consti­tuer des cen­tra­li­tés attrac­tives pour les milieux envi­ron­nants, ou qu’une par­tie impor­tante est en train de se jouer autour des véhi­cules élec­triques, point que la plu­part des spé­cia­listes de pros­pec­tive contestent for­mel­le­ment.
Bref, au final, un ouvrage plus que déce­vant, révé­la­teur d’un cer­tain manque de rigueur et de séduc­tion pour les mots-valises dont font preuve nombre d’experts inter­ve­nant de manière crois­sante dans le champ de l’aménagement urbain. On en sort d’autant plus frus­tré – c’est le cas de le dire – que beau­coup de repré­sen­tants de l’écologie urbaine ou bien de l’architecture s’interrogent de manière beau­coup plus solide sur les notions de fru­ga­li­té, d’architecture modeste…