Revue de réflexion politique et religieuse.

Neil Post­man : Se dis­traire à en mou­rir

Article publié le 5 Avr 2011 | imprimer imprimer  | Version PDF | Partager :  Partager sur Facebook Partager sur Linkedin Partager sur Google+

La repu­bli­ca­tion de cet ouvrage – écrit en 1985 et tra­duit l’année sui­vante en fran­çais – laisse un sen­ti­ment étrange, non­obs­tant la pré­face plu­tôt banale de Michel Rocard. Cher­cheur amé­ri­cain spé­cia­liste des ques­tions de com­mu­ni­ca­tion, Post­man (1931–2003) était assez proche de Noam Chom­sky par ses ana­lyses sinon de sa mou­vance. Son pro­pos, soi­gneu­se­ment arti­cu­lé en dix cha­pitres, vise à retra­cer la manière dont la télé­vi­sion (comme tech­nique de com­mu­ni­ca­tion) s’est pro­gres­si­ve­ment sub­sti­tuée à toutes les formes d’expression de la pen­sée, écrite comme orale, notam­ment en la déso­cia­li­sant par sa dimen­sion com­plè­te­ment pas­sive – pro­blème auquel il est par­ti­cu­liè­re­ment sen­sible. Il suit ain­si, aux Etats-Unis, le pas­sage des confé­rences, débats ani­més, au jour­nal impri­mé et enfin, au sys­tème du « show » télé­vi­sé per­ma­nent réduc­teur de conte­nu, des­truc­teur de capa­ci­tés d’analyse et de com­pré­hen­sion.
La dif­fi­cul­té de ce genre d’analyses, déjà assez datées et fina­le­ment assez peu ori­gi­nales, est d’être très limi­tées du fait de ne cibler que l’aspect cultu­rel du pro­blème, lais­sant com­plè­te­ment de côté sa dimen­sion éco­no­mique et poli­tique. La réduc­tion de la vie cultu­relle dans le monde actuel tient bien moins de l’écrasement, de l’extérieur, par des tech­niques de com­mu­ni­ca­tion, que de l’épuisement de l’intérieur d’une pen­sée occi­den­tale tour­née vers elle-même et qui, bien avant d’inventer la télé­vi­sion, avait visé à pro­gres­si­ve­ment se sécu­la­ri­ser tota­le­ment, c’est-à-dire à se sui­ci­der.

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