Revue de réflexion politique et religieuse.

Conser­va­tisme et libé­ra­lisme, relire Burke

Article publié le 3 Avr 2011 | imprimer imprimer  | Version PDF | Partager :  Partager sur Facebook Partager sur Linkedin Partager sur Google+

Le texte qui suit est la ver­sion écrite, légè­re­ment révi­sée par l’auteur pour la pré­sente publi­ca­tion, d’une inter­ven­tion effec­tuée par le pro­fes­seur Joël Hau­te­bert lors d’un col­loque sur le conser­va­tisme, tenu en 2006 au sein de l’Université de Caen. Il nous est paru utile d’offrir par ce biais un élé­ment de réfé­rence per­met­tant de com­prendre l’esprit du conser­va­tisme, que l’on rap­pro­che­ra bien évi­dem­ment de cer­taines inter­pré­ta­tions réfor­mistes propres au cours nou­veau affec­tant l’Eglise d’aujourd’hui.

Dans Le Capi­tal, Karl Marx pré­sente Edmund Burke comme « un syco­phante, qui à la solde de l’oligarchie anglaise a joué le roman­tique contre la révo­lu­tion fran­çaise, de même qu’à la solde des colo­nies du nord de l’Amérique, au com­men­ce­ment de leurs troubles, il avait joué le libé­ral contre l’oligarchie anglaise ». L’impression d’équivoque, d’ambiguïté qui se dégage de l’oeuvre de Burke est encore sou­li­gnée par nombre d’auteurs contem­po­rains. Selon Michel Gan­zin, auteur d’une thèse sur Edmund Burke, ce der­nier se situe entre « tra­di­tio­na­lisme conser­va­teur et libé­ra­lisme tra­di­tio­na­liste ». Dans la pré­face de cet ouvrage, Hen­ri Morel affirme que « cet homme paraît être la contra­dic­tion incar­née, à la fois ou tour à tour libé­ral et conser­va­teur, adepte de Locke et du pro­vi­den­tia­lisme ». De son côté, l’Italien Mau­ro Len­ci inti­tule son étude sur l’auteur anglais, « Indi­vi­dua­lisme démo­cra­tique et libé­ra­lisme aris­to­cra­tique dans la pen­sée poli­tique d’Edmund Burke ».
On pour­rait alour­dir encore la liste des juge­ments sur notre auteur, tant l’interprétation de son œuvre a sus­ci­té des appré­cia­tions diverses et contra­dic­toires, comme en témoignent encore quelques publi­ca­tions récentes. Mais y a‑t-il vrai­ment une uni­té dans l’ensemble de l’œuvre intel­lec­tuelle et de l’action poli­tique d’Edmund Burke ? Il peut s’agir en effet du com­bat­tant pour les colons amé­ri­cains, du défen­seur des autoch­tones contre l’administration anglaise aux Indes, ou du pour­fen­deur de la révo­lu­tion fran­çaise. La pro­blé­ma­tique a sou­vent été abor­dée en ces termes : y a‑t-il une véri­table doc­trine poli­tique d’Edmund Burke ? Répondre à cette inter­ro­ga­tion s’avère d’autant plus déli­cat que l’auteur fut un homme poli­tique enga­gé, réagis­sant à des évé­ne­ments poli­tiques pré­cis. Nous n’avons pas ici la pré­ten­tion d’apporter une pierre sup­plé­men­taire à l’édifice intel­lec­tuel d’approfondissement de la pen­sée de cet Anglais, car elle ris­que­rait de man­quer d’originalité, et ce n’est pas l’objet de notre réflexion. Plus modes­te­ment, à une époque où les cou­rants de pen­sée anglo-saxons béné­fi­cient d’une atten­tive et posi­tive curio­si­té, il nous a paru oppor­tun d’évoquer cette grande figure ain­si que les réfé­rences pos­té­rieures à son œuvre, en lien avec la pen­sée contre-révo­lu­tion­naire. […]

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