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Les fruits amers d’une “croi­sade”

Dans l’imaginaire col­lec­tif du monde musul­man, la Croi­sade et les Croi­sés tiennent une place essen­tielle : ils sont le Mal, l’agression injus­ti­fiable, Chi­tan fait homme et chré­tien. Qu’à la suite du Pro­phète les Armées d’Allah aient conquis, raz­zié ou rasé, sou­mis presque toutes les terres de l’Indus à l’Atlantique, ce n’est pas un pro­blème, mais un pro­grès ; mais que des Chré­tiens tentent de reprendre cer­taines par­ties du ter­ri­toire qu’ils peu­plaient naguère, avant cette conquête, c’est le scan­dale abso­lu, le crime inex­piable contre l’islam, donc contre Dieu. Le lien défi­ni­tif entre islam poli­tique et islam reli­gieux, entre force et loi (divine ou humaine, c’est la même), per­met un pas­sage aisé de la reven­di­ca­tion ou de la défense du ter­ri­toire au pro­sé­ly­tisme « sur le che­min d’Allah ». Toute action de force contre un pays musul­man est une nou­velle croi­sade et doit être repous­sée comme celles qui, fina­le­ment, échouèrent au Moyen Age. Les Occi­den­taux et les Russes le savent, ou devraient le savoir.
Quelle que soit leur moti­va­tion réelle et per­son­nelle, les com­bat­tants qui, à cette occa­sion, se dressent contre les croi­sés, mènent le bon com­bat, le jihad, qui fera d’eux, la mort échéant, des mar­tyrs accueillis au para­dis avec hon­neur et plai­sirs. Même les com­bat­tants du FLN, dont les diri­geants étaient sou­vent plus mar­xistes ou tiers­mon­distes qu’islamistes, étaient des moud­ja­hi­din, des com­bat­tants du jihad qui lut­taient contre des croi­sés, même si l’esprit des gou­ver­nants fran­çais était fort éloi­gné de celui des vrais Croi­sés. L’intervention sovié­tique en Afgha­nis­tan, avant celle des Alliés des Amé­ri­cains, a été vite pré­sen­tée et per­çue sur place comme une autre croi­sade, ce qui a ren­for­cé l’image et le pou­voir des isla­mistes et spé­cia­le­ment des Tali­bans. Et la croi­sade sovié­tique a abou­ti à la mort de l’agresseur. La guerre fon­dée sur des men­songes contre l’Irak de Sad­dam Hus­sein, puis qui a ten­du à créer un nou­vel Irak démo­cra­tique et res­pec­tueux des prin­cipes occi­den­taux, a pris la même colo­ra­tion pour les musul­mans ira­kiens bru­ta­le­ment plon­gés dans la misère et l’insécurité, d’autant plus faci­le­ment que les Anglo-Saxons qui l’avaient déci­dée et diri­gée ne rechi­gnaient pas à se pré­sen­ter comme des pro­phètes, des jus­ti­ciers, des envoyés de Dieu qui appor­taient la paix, la liber­té, le lait et le miel. Les isla­mistes, en tout cas, chiites fon­da­men­ta­listes et sun­nites se récla­mant d’Al Qaï­da (qui était absente d’Irak avant la venue des Libé­ra­teurs) ont su en faire leur miel, tout comme les truands de tout bord, s’affi chant volon­tiers comme des résis­tants à la croi­sade. […]