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Rober­to de Mat­tei : Apo­lo­gia del­la Tra­di­zione. Pos­crit­to a Il Conci­lio Vati­ca­no II. Una sto­ria mai scrit­ta

L’his­toire jamais écrite de Vati­can II, parue en 2010, a atti­ré à son auteur cer­taines attaques vio­lentes, tant de la part des ultimes repré­sen­tants de l’esprit du Concile que d’éléments jusque-là répu­tés modé­rés mais depuis peu mués en « néo-conci­liaires ». R. de Mat­tei ne donne pas ici des réponses de détail à ses détrac­teurs. Il s’intéresse plu­tôt à l’argument prin­ci­pal sur lequel ils prennent appui pour essayer de muse­ler tout ques­tion­ne­ment sur la légi­ti­mi­té de quelque point que ce soit de Vati­can II et de ses suites logiques : la sou­mis­sion au Magis­tère vivant. Ce qui est sin­gu­lier, c’est que les deux ten­dances ne s’entendent que sur ce com­mun usage de la même arme dia­lec­tique, qu’ils soient pour la rup­ture ou pour la conti­nui­té. D’un point de vue théo­rique, ils adhèrent au même auto­ri­ta­risme.
C’est pour­quoi R. de Mat­tei arti­cule sa réponse autour de deux argu­ments, l’un his­to­rique (un cer­tain nombre de papes se sont trom­pés, tel par exemple Zosyme qui, en 418, jugeait Pélage indemne d’erreurs, ou Léon XIII avec le Ral­lie­ment), l’autre doc­tri­nal. Sur ce der­nier point, il rap­pelle que le terme « magis­tère » n’est pro­ba­ble­ment appa­ru qu’en 1835, qu’il est encore absent dans le Dic­tion­naire de théo­lo­gie catho­lique (1909–1950) et qu’il n’a com­men­cé de s’identifier à la Tra­di­tion de l’Eglise qu’à par­tir des len­de­mains de la IIe Guerre mon­diale, sous l’influence du théo­lo­gien jésuite Filo­gras­si. Un dépla­ce­ment s’est alors opé­ré, avec les meilleures inten­tions du monde (ren­for­cer l’autorité pour parer les dan­gers de la « Nou­velle Théo­lo­gie »), finis­sant par résu­mer l’ensemble des élé­ments consti­tu­tifs de la Tra­di­tion (les conciles géné­raux, les Pères, la croyance sem­per et ubique des fidèles, l’autorité des théo­lo­giens, etc.) à la seule expres­sion actuelle de l’organe fonc­tion­nel de sa trans­mis­sion quo­ti­dienne – trans­mis­sion qui ne peut jamais être une trans­mis­sion ex nihi­lo. Et non seule­ment Vati­can II n’a pas cor­ri­gé cette ten­dance qua­si bureau­cra­tique qu’avait déplo­rée en son temps le car­di­nal Pie­tro Parente, mais celle-ci s’est consi­dé­ra­ble­ment aggra­vée depuis, comme moyen cette fois d’imposer arbi­trai­re­ment le silence face aux nou­veau­tés par voie d’affirmation pure et d’exigence de sou­mis­sion. Le pro­blème avait déjà été sou­le­vé par le théo­lo­gien libé­ra­tion­niste Juan Luis Segun­do dans sa Respues­ta al car­de­nal Rat­zin­ger (1985), qui disait être prêt à accep­ter tout ensei­gne­ment dog­ma­tique infaillible de l’Eglise, mais pas de la même manière n’importe quel énon­cé n’en rele­vant pas. L’argument était d’autant mieux fon­dé qu’il est même recon­nu dans le nou­veau Code de droit cano­nique de 1983 (can. 748–3).
A la fin de cette sub­stan­tielle « apo­lo­gie », l’auteur insiste sur le fait que si Vati­can II devait être le cri­tère inter­pré­ta­tif de la Tra­di­tion, il fau­drait attri­buer une force inter­pré­ta­tive à ce qui, selon le dis­cours de Benoît XVI du 22 décembre 2005, doit lui-même être inter­pré­té : cercle vicieux, démon­trant par l’absurde la néces­si­té de sor­tir de l’indétermination du « pas­to­ral » et d’en reve­nir à des points de vue plus clas­siques en la matière. Le seul espoir, conclut R. de Mat­tei, est que soit à nou­veau exer­cé un pou­voir pon­ti­fi­cal au sens plé­nier – celui-là même qui a été écar­té par Jean XXIII au moment d’entrer dans l’époque conci­liaire.