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La nou­velle tyran­nie

Quand on parle de tyran­nie, on pense aux tyrans, c’est-à-dire à l’action déli­bé­rée d’individus ou de groupes dési­reux de s’approprier le pou­voir sur les autres. Est-ce le cas ?
C’est quelque chose de pen­sé, de pla­ni­fié. Tou­te­fois si pour un cer­tain nombre de gens, c’est une stra­té­gie, il s’agit aus­si d’un pro­ces­sus social, qui s’é­tend entre mai 68 et la chute du mur de Ber­lin, pro­ces­sus qui exprime le cri de rébel­lion de l’homme bles­sé par les tota­li­ta­rismes, et qui a envie de faire écla­ter sans frein la par­tie la plus répri­mée de sa vie. La gauche, qui avait tou­jours eu un pro­gramme très clair de des­truc­tion de l’ordre chré­tien, que ce soit par la vio­lence ou non, en ce moment pré­cis de l’histoire a pen­sé que la meilleure manière d’y arri­ver consis­tait à tirer par­ti de cette ten­dance et à créer un ordre alter­na­tif, avec ses normes propres. Le pro­ces­sus nou­veau a donc démar­ré sur cette idée très intel­li­gente, en rem­pla­çant deux de ses bases les plus tra­di­tion­nelles. En pre­mier lieu, son dog­ma­tisme idéo­lo­gique a été rem­pla­cé par un unique dogme, « fais ce que tu veux », c’est-à-dire : suis tes pul­sions, laisse-toi aller sans limites. Mais bien évi­dem­ment, tout pacte avec le diable a sa contre­par­tie : en échange, il faut lui remettre notre âme ! La des­truc­tion doit deve­nir loi. L’astuce a consis­té à pour­suivre la même fin (la des­truc­tion de l’ordre chré­tien) mais avec des méthodes tota­le­ment dif­fé­rentes de celles anté­rieu­re­ment uti­li­sées. La gauche s’est conver­tie aux prin­cipes de la droite, accep­tant son ordre éco­no­mique, le capi­ta­lisme, et l’a même dépas­sée sur ce ter­rain, en exal­tant le bien-être, la consom­ma­tion, l’hédonisme. C’est un cadre bien plus pro­pice à la des­truc­tion que le com­mu­nisme. Il y a donc eu échange entre gauche et droite. La droite obtient que l’on ne dis­cute plus la légi­ti­mi­té de son sys­tème éco­no­mique, et la gauche, qu’on ne dis­cute pas son ordre moral et social, qui est la dis­so­lu­tion des liens et l’exaltation des dési­rs. Et c’est ain­si que les deux anti-huma­nismes se sont unis, le capi­ta­lisme et cet espèce de rela­ti­visme déchaî­né. Lors des anni­ver­saires de la chute du mur de Ber­lin, les imbé­ciles de la droite ont crié vic­toire en pré­ten­dant que c’était le sym­bole de la fin de la gauche, alors qu’en fait c’était la marque de son triomphe !
La lutte idéo­lo­gique se déroule donc dans un cli­mat dans lequel la droite accepte que le cadre cultu­rel, les para­digmes sociaux qui servent de fond, soient ceux qui ont été impo­sés depuis 1968, cadre auquel elle n’a abso­lu­ment rien à oppo­ser. C’est cela que j’appelle le Matrix progre, la Matrice pro­gres­siste. Zapa­te­ro, comme Sar­ko­zy, ont cha­cun leur clo­chette pour obte­nir que leurs clien­tèles res­pec­tives réagissent, comme les chiens de Pav­lov, en sali­vant au moment oppor­tun. Mais il n’y a pas de dif­fé­rence entre leurs dis­cours.
Le film Matrix est bien repré­sen­ta­tif de ces réa­li­tés, quand les pro­ta­go­nistes pensent vivre une vie authen­tique jusqu’au moment où ils se rendent compte qu’en fait la vie qu’ils mènent est le fruit d’une sorte de pla­cen­ta que leur injecte une machine. L’homme est mis en escla­vage par un pou­voir qui insi­nue dans les esprits ses modèles cultu­rels et en exige le res­pect.